S’attaquer enfin aux racines de la tuberculose

En étendant leur action à la prévention de la tuberculose, les responsables de la santé publique peuvent faire baisser le nombre d’infections, permettre aux gens de prendre leur santé en main, et progresser encore dans l’élimination de la tuberculose en France.

La tuberculose est devenue la maladie infectieuse la plus meurtrière du monde, selon l’OMS (l’Organisation mondiale de la santé). Cette maladie bactérienne transmise par l’air a en effet coûté la vie à 1,5 million de personnes en 2014, devançant officiellement le SIDA (1,2 million de décès).

Pour vaincre la tuberculose, il faut non seulement diagnostiquer et soigner correctement cette maladie, mais aussi empêcher que les infections n’évoluent vers la maladie. En effet pour chaque cas de tuberculose dans le monde, il y a plus de 200 infections silencieuses qui attendent de se manifester.

Respirer la bactérie ne conduit pas immédiatement à cette maladie grave. Un bon système immunitaire peut en effet maîtriser les bactéries en les enfermant dans une capsule microscopique qui les empêche d’attaquer le reste du corps.

Une personne infectée peut ainsi être porteuse de la tuberculose pendant des années, voire des décennies, sans tomber malade ni être contagieuse. Mais une personne infectée sur 10 développera la maladie au cours de sa vie, et il n’existe toujours aucun vaccin efficace pour l’empêcher.

La plupart d’entre nous ne se préoccupent probablement pas de la tuberculose, pensent qu’elle a été éradiquée depuis des années, alors que plus de 5 000 personnes sont atteintes de tuberculose chaque année en France.

Traiter l’infection avant qu’elle ait la possibilité de se transformer en une maladie active et contagieuse peut prévenir d’autres infections, sauver des vies et diminuer les coûts de santé publique.

Donner la priorité au traitement de la maladie active et négliger l’importance de la prévention reviendrait à vouloir vider une baignoire dont le robinet coule toujours.

Une infection rapidement détectée peut-être traitée par une cure d’antibiotiques préventifs. En revanche lorsque la tuberculose s’est transformée en une maladie active, le traitement peut être deux fois plus long, quadrupler le nombre d’antibiotiques plus toxiques, et il arrive souvent trop tard pour empêcher des lésions pulmonaires irréversibles.

Les politiques de santé publique en France mettent particulièrement en avant la prévention, mais les outils d’aujourd’hui sont les mêmes qu’il y a plus d’un siècle. En effet, l’intradermo-réaction à la tuberculine (la “cuti”) demeure encore largement utilisée dans le dépistage de l’infection tuberculeuse latent. Jusqu’il y a peu, elle était même obligatoire pour tous les personnels hospitaliers.

Or de nouveaux tests plus précis et plus pratiques existent, à même de remplacer dans bien des cas la vénérable “cuti”.

Depuis quelques semaines, les personnels des hôpitaux peuvent utiliser ces nouveaux tests en se dispensant de la cuti et de la radiographie de poumons systématique.

Ces nouveaux tests, appelés IGRAs (Interferon-Gamma Release Assays), ne sont pas encore remboursés et restent à la charge des patients lorsqu’ils sont pratiqués hors de l’hôpital.

La Caisse Nationale d’Assurance Maladie, en accord avec la Haute Autorité de Santé suite à son argumentaire du mois de juin 2015, et la Commission d’Homologation des Actes de Biologie, sont en train de travailler au remboursement de ces tests innovants, permettant à tous de bénéficier de l’utilisation de ces “IGRAs”.

Le Ministère des Affaires sociales et de la Santé pourrait lancer une campagne d’information du public pour le sensibiliser à la tuberculose, se concentrant sur les communautés et ceux qui dispensent des soins aux familles et aux personnes qui courent le plus grand risque d’infection et de maladie. La sensibilisation permet en effet aux gens de demander un dépistage et de prendre leur santé en main. Chaque personne a le droit de savoir si elle est infectée, afin de pouvoir demander le traitement et les soins appropriés.

L’importance de cette question dépasse de loin l’idéologie politique — si nous voulons réellement éradiquer cette terrible maladie, nous devons collaborer. En étendant leur action à la prévention de la tuberculose, les responsables de la santé publique peuvent faire baisser le nombre d’infections, permettre aux gens de prendre leur santé en main, et progresser encore dans l’élimination de la tuberculose en France.

Yaël Ossowski est un journaliste Canadien vivant actuellement à Vienne.

Cet article a été publié sur Huffington Post France

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